Campagne d'Egypte (1800). Comment les armées de Bonaparte traitèrent le meurtier du Général Kleber
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Campagne d'Egypte (1800). Comment les armées de Bonaparte traitèrent le meurtier du Général Kleber
La justice militaire française, en Egypte,
en l’an 1800, venge le général Kléber.
Et condamne l'assassin au supplice du Pal.
Jean-Baptiste KLEBER
Bonaparte abandonnant l'Égypte en avait laissé le commandement supérieur à Kléber,
une des plus brillantes et des plus solides renommées militaires de la révolution.
Dévoué à la république, à laquelle il devait sa fortune ; général d'une capacité reconnue,
éprouvée, Kléber était avec Desaix et Moreau un des rivaux que l'opinion publique opposait
à l'ambitieux chef de l'armée d'Italie.
Kléber accepta la mission qui lui était confiée, mais avec l'intention de terminer l'expédition
et de ramener à sa patrie menacée les vaillants soldats de l'armée d'Orient.
Toujours contraire à la campagne d'Égypte, irrité d'ailleurs du départ précipité de Bonaparte,
séparé de la France par les croisières anglaises, privé de ressources, d'appuis, chargé de la conduite
d'une armée qui s'affaiblissait sans cesse sous ce climat dévorant, il se sentit découragé et ne désirait plus que le retour.
Par l'entremise du commandant de la flotte anglaise, Sidney Smith, il ouvrit donc des négociations
avec la Porte Ottomane , et conclut définitivement un traité, signé à la forteresse d'El-Arish,
par lequel l'armée française devait évacuer le pays à la condition d'être transportée en France sur les vaisseaux anglais ;
et en même temps il adressa au Directoire une lettre où il annonçait sa résolution et la justifiait
par sa détresse et les dangers de sa situation.
Déjà, après avoir selon les conventions remis aux Turcs les places principales de l'Égypte, il se dirigeait
vers la côte avec ses troupes afin de s'embarquer, lorsque l'amiral Keith, qui avait intercepté la lettre envoyée
au Directoire et croyait la position des Français désespérée, signifia à Kléber que l'Angleterre ne reconnaissait
point la convention d'El Arish , et qu'elle ne consentirait à aucune capitulation avant que son armée n'eût
mis bas les armes, ne se fût rendue prisonnière et n'eût abandonné tous ses vaisseaux et toutes les munitions
des ports d'Alexandrie aux puissances alliées.
Et c'était après avoir autorisé le traité, après être en quelque sorte intervenu dans les négociations,
que le gouvernement anglais déclarait de si perfides intentions et tenait notre armée enfermée entre les villes
rendues aux Turcs et les flottes anglaises. Cet acte de déloyauté semblait devoir anéantir les malheureux
débris de l'expédition d'Égypte ; mais l'extrémité même où on réduisait nos soldats leur inspira un courage
qui nous rendit la possession de l'Égypte.
Kléber, pressé de toutes parts, retrouva son énergie et la communiqua à ses troupes ; il mit à son ordre du jour
l'étrange déclaration de lord Keith, et la fit suivre de ces éloquentes paroles :
"Soldats, on ne répond à une telle insolence que par des victoires; préparez-vous à combattre!"
Puis, avec dix mille hommes, il marcha contre les Turcs, les attaqua près des ruines d'Héliopolis, les mit en pleine
déroute et s'empara de leurs canons, de leurs bagages, de leurs chameaux ; après cette victoire décisive il revint
sur le Caire, bombarda la ville, que lui livra un siége de dix jours, et ramena tout le pays à la domination française.
Ces rapides succès relevèrent la confiance du général en chef ; les nouvelles récemment arrivées de France lui
avaient appris le mouvement du 18 brumaire, et, plutôt que d'aller ou combattre ou subir l'influence du premier consul,
il conçut le dessein de réaliser enfin la colonisation de l'Égypte, de s'établir sur les rives du Nil et d'y attendre,
dans l'indépendance que lui assurait le gouvernement de cette lointaine contrée, l'issue des événements dont
la France était alors le théâtre.
Ses triomphes récents le secondaient merveilleusement ; ce retour de fortune contre toute attente semblait aux
habitants de l'Égypte le résultat d'une décision supérieure :
ils considéraient le général en chef avec un mélange de terreur et d'admiration ;
son invariable fidélité à sa parole avait gagné leur confiance, la justice de son administration acheva leur soumission.
Kléber réorganisa les finances, forma différents corps indigènes, rétablit l'ordre et le calme autour de lui ;
son activité enfin allait vraisemblablement acquérir pour toujours cette conquête à la France, lorsque l'attentat
d'un fanatique en leva tout à coup l'habile général à la gloire de cette grande entreprise.
L'assassinat de Kleber
Le 14 juin 1800, Kléber, après avoir passé la revue de la légion grecque, vint au Caire pour examiner des
travaux qu'on faisait au palais qu'il habitait.
Avant de les visiter, il assista à un brillant déjeuner chez le général chef d'état major général ;
des membres de l'Institut, des officiers étaient réunis à ce repas, où Kléber se montra plus gai que de coutume.
Le succès qui couronnait ses efforts, le développement des établissements français, les témoignages d'affection
qu'il recevait de la population avaient dissipé sa froideur ordinaire ; il était animé, aimable, expansif :
aucun de ceux qui l'entouraient ne pressentait que ce joyeux déjeuner fût un banquet d'adieux.
A deux heures, le général, accompagné seulement de Protain son architecte, se rendit à son palais ;
pour y arriver il suivait une longue galerie ombragée d une épaisse vigne, qui liait l'habitation du major général
à celle du général en chef, et s'entretenait avec son architecte des embellissements qu'il projetait, quand un musulman,
sortant à l'improviste d'une galerie voisine, s'approche de Kléber, s'incline devant lui comme pour embrasser sa main et,
profitant du premier instant de surprise qu'excite sa présence, se relève et porte un coup de poignard au général
en chef de l'armée d'Égypte:
"A moi, guide, je suis assassiné ! "
s'écrie Kléber, qui venait d'apercevoir au loin un de ses guides ; il essaie encore de s'appuyer au mur de la terrasse
et tombe baigné dans son sang.
A peine Protain a-t-il vu cette action qu'il se jette sur l'assassin et engage avec lui une lutte,
dans laquelle il reçoit six blessures ;
son adversaire alors le laisse évanoui, revient sur Kléber, qu'il frappe trois fois encore, bien que déjà
le premier coup fût mortel, s'échappe de la galerie et, n'espérant pas trouver une issue pour fuir du palais,
se cache dans les hautes plantes des jardins.
Cependant l'alarme s'était répandue, le cri d'angoisse de Kléber avait retenti ; bientôt les gardes, les officiers,
tous ces amis avec lesquels naguère il portait la santé de la république l'entouraient essayant d'en obtenir quelques paroles :
Ils l'interrogèrent vainement, Kléber ne put parler.
Quelques instants plus tard le général en chef de l'armée d'Égypte rendait le dernier soupir, la France
perdait un de ses plus nobles enfants, un de ses plus intrépides défenseurs.
Tandis qu'on transportait Kléber dans l'appartement du major général on fouillait le palais et les jardins
dans tous les sens, sur tous les points.
Deux guides amenèrent un jeune homme qu'ils avaient surpris caché sous un napal touffu :
l'architecte Protain, revenu à lui, reconnut l'assassin, qui fut jeté en prison ainsi que trois ulémas de la grande
mosquée du Caire.
Lorsqu'elle apprit le meurtre de son chef l'armée fut saisie d'une consternation profonde, qui se changea bientôt
en une ardente soif de vengeance.
Tout s'agita dans la ville ; les habitants se renfermaient avec terreur dans leurs maisons, les magasins se fermaient.
Nos soldats, furieux, égarés, parcouraient les rues jetant autour d'eux des regards menaçants et criant :
"Aux armes ! vengeons, vengeons Kléber ! "
Ce ne fut pas sans peine qu'on put contenir l'excès de cette légitime douleur, et il fallut du moins que le châtiment
des coupables satisfit pleinement le ressentiment public,
Le supplice du criminel
D'abord Soleyman et les ulémas avaient tenté de nier ; mais la torture de la bastonnade força bientôt
des aveux complets.
On apprit que Soleyman avait été envoyé au Caire par le vizir Jussouf, qui prétendait se venger
ainsi de ses défaites.
Au Caire, les ulémas de la grande mosquée, à qui on l'avait adressé, avaient exalté par leurs encouragements
l'imagination du musulman ; puis ils lui remirent un poignard et lui montrèrent Kléber.
Un exemple était nécessaire ; l'armée d'ailleurs réclamait une expiation rigoureuse.
Soleyman fut condamné à avoir le poing brûlé et à subir ensuite l'affreux supplice du pal :
ses complices eurent la tête tranchée.
« Le supplice du pal, aussi appelé empalement, est une forme d’exécution passive,
réputée pour être particulièrement douloureuse et spectaculaire, à l’instar du crucifiement. »
« La commission est allée aux voix sur le genre de supplice à infliger aux coupables ;
elle a fait lecture de l’article V de l’arrêté du général Menou, du jour d’hier, conçu en ces termes :
« La commission décernera le genre de supplice qu’elle jugera convenable, pour punir l’assassin qui a
commis le crime, ainsi que ses complices. »
« Elle a décidé à l’unanimité de choisir un genre de supplice en usage dans le pays pour les plus grands crimes,
et proportionné à la grandeur de l’attentat, et a condamné Soleyman el-Hhaleby à avoir le poignet droit brûlé,
être ensuite empalé, et rester sur le pal jusqu’à ce que son cadavre soit dévoré par les oiseaux de proie.
Cette exécution aura lieu sur la butte du fort de l’Institut, aussitôt après l’enterrement du Général en Chef Kleber,
en présence de l’armée et des habitants, réunis pour ledit enterrement. »
Depuis que Kléber était mort, toutes les demi heures on tirait un coup de canon en signe de deuil.
Le 17 juin, dès la pointe du jour, des salves d'artillerie annoncèrent à l'Égypte les funérailles du général,
qui furent célébrées avec une pompe digne de ce grand nom et des regrets de l'armée.
Le corps de Kléber, placé sur un char tendu de velours noir semé de larmes d'argent et entouré de trophées,
de drapeaux, de lauriers, fut conduit à la redoute d'Ibrahim, où il devait être enseveli.
Tous les corps de l'armée, les principales autorités du Caire, les généraux environnaient le noble cercueil,
sur lequel les soldats jetèrent à l'envi des couronnes de cyprès et de lauriers tandis qu'un membre de l'Institut,
Fourier, prononçait l'éloge du héros qu'on pleurait.
La mort de l'assassin
Ses complices se font trancher la tête au cimeterre avant d'être empalés sous les yeux de Soleyman.
„ Son tour venu, on étendit résolument son bras sur le foyer préparé pour brûler son poignet.“ (…)
„ Le poing brûlé, le bourreau Barthélemy coucha Suleyman sur le ventre, tira un couteau de sa poche,
lui fit au fondement une large incision, en approcha le bout de son pal et l’enfonça à coups de maillet.
Puis, il lia les bras et les jambes du patient, l’éleva en l’air et fixa le pal dans un trou préparé.
Un soldat allait lui chercher de l’eau. Gardez vous en, lui dit Barthélemy en le retenant, il mourrait aussitôt ! “
Soliman vécut encore durant quatre heures, et il eut vécu plus si, durant l'absence de Barthélemy un soldat
qui était au pied du pal ne lui eut donné à boire : à l'instant même il expira.»
Aujourd'hui
Le poignard qui servit pour son assassinat est exposé de nos jours au Musée des Beaux-arts de Carcassonne.
Il fut rapporté par son secrétaire, le carcassonnais, André Peyrusse.
Le commandement est alors repris par le général Menou, rival de Kléber.
Converti à l'islam et marié à une Égyptienne, il se fait appeler Abdallah-Jacques.
Il lui appartient de liquider l'expédition d'Égypte à la suite de la défaite face aux Britanniques.
Les restes de Kléber, rapportés à Marseille, étaient oubliés dans le château d'If, lorsque Louis XVIII ordonna,
en 1818, qu'ils fussent transférés dans sa ville natale, qui les reçut avec gratitude et vénération.
Ils reposent dans un caveau construit au milieu de la place d'armes, et au-dessus duquel Strasbourg
et la France entière ont fait élever une statue en bronze, inaugurée le 14 juin 1840.
Le crâne du supplicié est récupéré par le chirurgien Larrey et montré pendant des années aux étudiants
de médecine parisiens, "afin de leur faire voir la bosse du crime et du fanatisme" avant de finir au musée de l'Homme.
„ . ....... La brûlure de la main s’était portée jusqu’aux os, et le pal, après avoir dilacéré les viscères du bas-ventre,
les nerfs et les vaisseaux, avait fracturé l’os sacrum, deux vertèbres lombaires, et s’était implanté dans le canal vertébral.
Je me suis convaincu de ces faits par l’inspection que je fis, quelques temps après, de son cadavre, quoique déjà desséché.
J’en conserve le squelette.“
(Dominique. J. Larrey , Paris , Demonville et Soeurs , An XI , 1803)
Source : www.vallee-du-ciron
Source : interrogatoire des meurtiers
Source : Kleber
en l’an 1800, venge le général Kléber.
Et condamne l'assassin au supplice du Pal.
Jean-Baptiste KLEBER
Bonaparte abandonnant l'Égypte en avait laissé le commandement supérieur à Kléber,
une des plus brillantes et des plus solides renommées militaires de la révolution.
Dévoué à la république, à laquelle il devait sa fortune ; général d'une capacité reconnue,
éprouvée, Kléber était avec Desaix et Moreau un des rivaux que l'opinion publique opposait
à l'ambitieux chef de l'armée d'Italie.
Kléber accepta la mission qui lui était confiée, mais avec l'intention de terminer l'expédition
et de ramener à sa patrie menacée les vaillants soldats de l'armée d'Orient.
Toujours contraire à la campagne d'Égypte, irrité d'ailleurs du départ précipité de Bonaparte,
séparé de la France par les croisières anglaises, privé de ressources, d'appuis, chargé de la conduite
d'une armée qui s'affaiblissait sans cesse sous ce climat dévorant, il se sentit découragé et ne désirait plus que le retour.
Par l'entremise du commandant de la flotte anglaise, Sidney Smith, il ouvrit donc des négociations
avec la Porte Ottomane , et conclut définitivement un traité, signé à la forteresse d'El-Arish,
par lequel l'armée française devait évacuer le pays à la condition d'être transportée en France sur les vaisseaux anglais ;
et en même temps il adressa au Directoire une lettre où il annonçait sa résolution et la justifiait
par sa détresse et les dangers de sa situation.
Déjà, après avoir selon les conventions remis aux Turcs les places principales de l'Égypte, il se dirigeait
vers la côte avec ses troupes afin de s'embarquer, lorsque l'amiral Keith, qui avait intercepté la lettre envoyée
au Directoire et croyait la position des Français désespérée, signifia à Kléber que l'Angleterre ne reconnaissait
point la convention d'El Arish , et qu'elle ne consentirait à aucune capitulation avant que son armée n'eût
mis bas les armes, ne se fût rendue prisonnière et n'eût abandonné tous ses vaisseaux et toutes les munitions
des ports d'Alexandrie aux puissances alliées.
Et c'était après avoir autorisé le traité, après être en quelque sorte intervenu dans les négociations,
que le gouvernement anglais déclarait de si perfides intentions et tenait notre armée enfermée entre les villes
rendues aux Turcs et les flottes anglaises. Cet acte de déloyauté semblait devoir anéantir les malheureux
débris de l'expédition d'Égypte ; mais l'extrémité même où on réduisait nos soldats leur inspira un courage
qui nous rendit la possession de l'Égypte.
Kléber, pressé de toutes parts, retrouva son énergie et la communiqua à ses troupes ; il mit à son ordre du jour
l'étrange déclaration de lord Keith, et la fit suivre de ces éloquentes paroles :
"Soldats, on ne répond à une telle insolence que par des victoires; préparez-vous à combattre!"
Puis, avec dix mille hommes, il marcha contre les Turcs, les attaqua près des ruines d'Héliopolis, les mit en pleine
déroute et s'empara de leurs canons, de leurs bagages, de leurs chameaux ; après cette victoire décisive il revint
sur le Caire, bombarda la ville, que lui livra un siége de dix jours, et ramena tout le pays à la domination française.
Ces rapides succès relevèrent la confiance du général en chef ; les nouvelles récemment arrivées de France lui
avaient appris le mouvement du 18 brumaire, et, plutôt que d'aller ou combattre ou subir l'influence du premier consul,
il conçut le dessein de réaliser enfin la colonisation de l'Égypte, de s'établir sur les rives du Nil et d'y attendre,
dans l'indépendance que lui assurait le gouvernement de cette lointaine contrée, l'issue des événements dont
la France était alors le théâtre.
Ses triomphes récents le secondaient merveilleusement ; ce retour de fortune contre toute attente semblait aux
habitants de l'Égypte le résultat d'une décision supérieure :
ils considéraient le général en chef avec un mélange de terreur et d'admiration ;
son invariable fidélité à sa parole avait gagné leur confiance, la justice de son administration acheva leur soumission.
Kléber réorganisa les finances, forma différents corps indigènes, rétablit l'ordre et le calme autour de lui ;
son activité enfin allait vraisemblablement acquérir pour toujours cette conquête à la France, lorsque l'attentat
d'un fanatique en leva tout à coup l'habile général à la gloire de cette grande entreprise.
L'assassinat de Kleber
Le 14 juin 1800, Kléber, après avoir passé la revue de la légion grecque, vint au Caire pour examiner des
travaux qu'on faisait au palais qu'il habitait.
Avant de les visiter, il assista à un brillant déjeuner chez le général chef d'état major général ;
des membres de l'Institut, des officiers étaient réunis à ce repas, où Kléber se montra plus gai que de coutume.
Le succès qui couronnait ses efforts, le développement des établissements français, les témoignages d'affection
qu'il recevait de la population avaient dissipé sa froideur ordinaire ; il était animé, aimable, expansif :
aucun de ceux qui l'entouraient ne pressentait que ce joyeux déjeuner fût un banquet d'adieux.
A deux heures, le général, accompagné seulement de Protain son architecte, se rendit à son palais ;
pour y arriver il suivait une longue galerie ombragée d une épaisse vigne, qui liait l'habitation du major général
à celle du général en chef, et s'entretenait avec son architecte des embellissements qu'il projetait, quand un musulman,
sortant à l'improviste d'une galerie voisine, s'approche de Kléber, s'incline devant lui comme pour embrasser sa main et,
profitant du premier instant de surprise qu'excite sa présence, se relève et porte un coup de poignard au général
en chef de l'armée d'Égypte:
"A moi, guide, je suis assassiné ! "
s'écrie Kléber, qui venait d'apercevoir au loin un de ses guides ; il essaie encore de s'appuyer au mur de la terrasse
et tombe baigné dans son sang.
A peine Protain a-t-il vu cette action qu'il se jette sur l'assassin et engage avec lui une lutte,
dans laquelle il reçoit six blessures ;
son adversaire alors le laisse évanoui, revient sur Kléber, qu'il frappe trois fois encore, bien que déjà
le premier coup fût mortel, s'échappe de la galerie et, n'espérant pas trouver une issue pour fuir du palais,
se cache dans les hautes plantes des jardins.
Cependant l'alarme s'était répandue, le cri d'angoisse de Kléber avait retenti ; bientôt les gardes, les officiers,
tous ces amis avec lesquels naguère il portait la santé de la république l'entouraient essayant d'en obtenir quelques paroles :
Ils l'interrogèrent vainement, Kléber ne put parler.
Quelques instants plus tard le général en chef de l'armée d'Égypte rendait le dernier soupir, la France
perdait un de ses plus nobles enfants, un de ses plus intrépides défenseurs.
Tandis qu'on transportait Kléber dans l'appartement du major général on fouillait le palais et les jardins
dans tous les sens, sur tous les points.
Deux guides amenèrent un jeune homme qu'ils avaient surpris caché sous un napal touffu :
l'architecte Protain, revenu à lui, reconnut l'assassin, qui fut jeté en prison ainsi que trois ulémas de la grande
mosquée du Caire.
Lorsqu'elle apprit le meurtre de son chef l'armée fut saisie d'une consternation profonde, qui se changea bientôt
en une ardente soif de vengeance.
Tout s'agita dans la ville ; les habitants se renfermaient avec terreur dans leurs maisons, les magasins se fermaient.
Nos soldats, furieux, égarés, parcouraient les rues jetant autour d'eux des regards menaçants et criant :
"Aux armes ! vengeons, vengeons Kléber ! "
Ce ne fut pas sans peine qu'on put contenir l'excès de cette légitime douleur, et il fallut du moins que le châtiment
des coupables satisfit pleinement le ressentiment public,
Le supplice du criminel
D'abord Soleyman et les ulémas avaient tenté de nier ; mais la torture de la bastonnade força bientôt
des aveux complets.
On apprit que Soleyman avait été envoyé au Caire par le vizir Jussouf, qui prétendait se venger
ainsi de ses défaites.
Au Caire, les ulémas de la grande mosquée, à qui on l'avait adressé, avaient exalté par leurs encouragements
l'imagination du musulman ; puis ils lui remirent un poignard et lui montrèrent Kléber.
Un exemple était nécessaire ; l'armée d'ailleurs réclamait une expiation rigoureuse.
Soleyman fut condamné à avoir le poing brûlé et à subir ensuite l'affreux supplice du pal :
ses complices eurent la tête tranchée.
« Le supplice du pal, aussi appelé empalement, est une forme d’exécution passive,
réputée pour être particulièrement douloureuse et spectaculaire, à l’instar du crucifiement. »
« La commission est allée aux voix sur le genre de supplice à infliger aux coupables ;
elle a fait lecture de l’article V de l’arrêté du général Menou, du jour d’hier, conçu en ces termes :
« La commission décernera le genre de supplice qu’elle jugera convenable, pour punir l’assassin qui a
commis le crime, ainsi que ses complices. »
« Elle a décidé à l’unanimité de choisir un genre de supplice en usage dans le pays pour les plus grands crimes,
et proportionné à la grandeur de l’attentat, et a condamné Soleyman el-Hhaleby à avoir le poignet droit brûlé,
être ensuite empalé, et rester sur le pal jusqu’à ce que son cadavre soit dévoré par les oiseaux de proie.
Cette exécution aura lieu sur la butte du fort de l’Institut, aussitôt après l’enterrement du Général en Chef Kleber,
en présence de l’armée et des habitants, réunis pour ledit enterrement. »
Depuis que Kléber était mort, toutes les demi heures on tirait un coup de canon en signe de deuil.
Le 17 juin, dès la pointe du jour, des salves d'artillerie annoncèrent à l'Égypte les funérailles du général,
qui furent célébrées avec une pompe digne de ce grand nom et des regrets de l'armée.
Le corps de Kléber, placé sur un char tendu de velours noir semé de larmes d'argent et entouré de trophées,
de drapeaux, de lauriers, fut conduit à la redoute d'Ibrahim, où il devait être enseveli.
Tous les corps de l'armée, les principales autorités du Caire, les généraux environnaient le noble cercueil,
sur lequel les soldats jetèrent à l'envi des couronnes de cyprès et de lauriers tandis qu'un membre de l'Institut,
Fourier, prononçait l'éloge du héros qu'on pleurait.
La mort de l'assassin
Ses complices se font trancher la tête au cimeterre avant d'être empalés sous les yeux de Soleyman.
„ Son tour venu, on étendit résolument son bras sur le foyer préparé pour brûler son poignet.“ (…)
„ Le poing brûlé, le bourreau Barthélemy coucha Suleyman sur le ventre, tira un couteau de sa poche,
lui fit au fondement une large incision, en approcha le bout de son pal et l’enfonça à coups de maillet.
Puis, il lia les bras et les jambes du patient, l’éleva en l’air et fixa le pal dans un trou préparé.
Un soldat allait lui chercher de l’eau. Gardez vous en, lui dit Barthélemy en le retenant, il mourrait aussitôt ! “
Soliman vécut encore durant quatre heures, et il eut vécu plus si, durant l'absence de Barthélemy un soldat
qui était au pied du pal ne lui eut donné à boire : à l'instant même il expira.»
Aujourd'hui
Le poignard qui servit pour son assassinat est exposé de nos jours au Musée des Beaux-arts de Carcassonne.
Il fut rapporté par son secrétaire, le carcassonnais, André Peyrusse.
Le commandement est alors repris par le général Menou, rival de Kléber.
Converti à l'islam et marié à une Égyptienne, il se fait appeler Abdallah-Jacques.
Il lui appartient de liquider l'expédition d'Égypte à la suite de la défaite face aux Britanniques.
Les restes de Kléber, rapportés à Marseille, étaient oubliés dans le château d'If, lorsque Louis XVIII ordonna,
en 1818, qu'ils fussent transférés dans sa ville natale, qui les reçut avec gratitude et vénération.
Ils reposent dans un caveau construit au milieu de la place d'armes, et au-dessus duquel Strasbourg
et la France entière ont fait élever une statue en bronze, inaugurée le 14 juin 1840.
Le crâne du supplicié est récupéré par le chirurgien Larrey et montré pendant des années aux étudiants
de médecine parisiens, "afin de leur faire voir la bosse du crime et du fanatisme" avant de finir au musée de l'Homme.
„ . ....... La brûlure de la main s’était portée jusqu’aux os, et le pal, après avoir dilacéré les viscères du bas-ventre,
les nerfs et les vaisseaux, avait fracturé l’os sacrum, deux vertèbres lombaires, et s’était implanté dans le canal vertébral.
Je me suis convaincu de ces faits par l’inspection que je fis, quelques temps après, de son cadavre, quoique déjà desséché.
J’en conserve le squelette.“
(Dominique. J. Larrey , Paris , Demonville et Soeurs , An XI , 1803)
Source : www.vallee-du-ciron
Source : interrogatoire des meurtiers
Source : Kleber
Dernière édition par Wearing of the Grey le Dim 9 Juin - 20:52, édité 1 fois
Wearing of the Grey- Admin_adjoint
- Messages : 1100
Date d'inscription : 09/01/2013
Localisation : Nord/Pas-de-Calais
Re: Campagne d'Egypte (1800). Comment les armées de Bonaparte traitèrent le meurtier du Général Kleber
Bonaparte n’était pas dans le coup !! sauf s'il faisait parti de la commission ?
Re: Campagne d'Egypte (1800). Comment les armées de Bonaparte traitèrent le meurtier du Général Kleber
adj_rohan a écrit:Bonaparte n’était pas dans le coup !! sauf s'il faisait parti de la commission ?
Tu as raison, j'ai volontairement mis un titre "accrocheur"
Le 23 août 1799, une proclamation apprend à l’armée que le général en chef Bonaparte venait de transmettre ses pouvoirs au général Kléber .
Le 14 juin 1800 (26 prairial), Kléber est assassiné.
Le général Menou qui lui succède avertit Bonaparte de l'assassinat de Kléber le 3 juillet 1800.
Wearing of the Grey- Admin_adjoint
- Messages : 1100
Date d'inscription : 09/01/2013
Localisation : Nord/Pas-de-Calais
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